Moments d'Histoire

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Les invasions barbares

En 27 avant notre ère, la République romaine cède sa place à l’Empire romain, dont le premier empereur est Auguste, de son vrai nom Octavius, fils d’un certain Jules César. Se dessinent alors les traits d’une vaste et puissante entité politique qui étend petit à petit sa domination sur l’Europe, l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient. L’Empire romain englobe un territoire immense allant de l’Angleterre à la Turquie en passant par la Gaule et le Maroc. Il s’agit tout simplement de l’une des plus grandes forces politiques de l’Histoire. L’Empire romain a profondément marqué l’histoire du monde par son organisation politique, ses innovations juridiques ou encore par son rayonnement culturel. Il connaît des périodes de prospérité exceptionnelles, qui en font, à bien des égards, un modèle de référence. Cependant, au IIe siècle de notre ère, des menaces venues de l’extérieur vont rapidement commencer à apparaître. Rome fait la découverte de peuples, souvent en provenance du nord de l’Europe ou de l’Asie, qui menacent la stabilité de l’Empire à ses frontières.

C’est le début d’une période bien connue de l’Histoire : les invasions barbares. Il ne faut pas voir le terme « barbares » comme négatif, il désigne tout bonnement les peuples étrangers à l’Empire romain, qui ne partagent ni leur langue ni leur modèle de civilisation. C’est d’ailleurs en raison de la connotation négative du terme que de nombreux historiens préfèrent parler de « migration des peuples » ou encore de « période de migrations ». Les Huns, les Goths ou encore les Francs font partie de ces peuples qui rentrent en conflit avec le monde romain, au point d’en menacer l’existence. Il est certain que les invasions barbares ont joué un rôle non-négligeable dans la chute de l’Empire romain, même si elles n’ont fait que précipiter un déclin qui semblait déjà inéluctable. Mais avant d’en arriver là, prenons le temps de revenir sur les invasions barbares dans l’Empire romain.

L'Empire romain à son apogée

Retrouvez l’épisode de À travers l’Histoire sur Attila !

Qui sont les Goths ?

Les Goths désignent un peuple germanique ayant existé grosso modo du Ier siècle au IXe siècle. Les Goths se sont divisés en deux branches, à l’issue d’un vaste mouvement migratoire qui les ont menés aux portes de l’Empire romain. D’une part, il y a les Wisigoths et d’autre part les Ostrogoths. Avant leur arrivée en Europe, nous ne savons pas grand-chose de leur histoire, les sources étant quasi-inexistantes. À cette époque, l’utilisation de l’écrit est une spécificité romaine et dans la plupart des autres peuples, comme les Goths, c’est la tradition orale qui prime. La plupart des informations dont nous disposons nous viennent de l’ouvrage L’Histoire des Goths, de Jordanès, historien latin du VIe siècle de notre ère. C’est une source majeure d’informations, mais qu’il faut aborder avec prudence, du fait du décalage temporel entre les faits et la vie de l’auteur.

Néanmoins, il est certain que les Goths ont profondément marqué l’histoire de l’Europe et de l’Empire romain. Après la chute de ce dernier, les Wisigoths vont s’installer dans l’actuelle Espagne tandis que les Ostrogoths vont poser le pied en Italie. Ils vont bâtir de puissants royaumes qui vont occuper une place centrale sur l’échiquier géopolitique européen durant tout le Moyen-Âge. Ces deux peuples ont profondément influencé l’histoire de l’Europe, dans laquelle ils ont été des véritables forces politiques avec lesquelles composer. À de nombreuses reprises, les Goths seront opposés à différentes entités puissantes, telles que l’Empire romain, le royaume franc ou encore les Sarrasins. Ils entretiendront des relations assez ambivalentes avec le royaume franc, sous la coupe de la dynastie mérovingienne, dont le plus illustre représentant est Clovis. Entre les Francs et les Goths, il s’agit tantôt d’une relation conflictuelle, tantôt d’une relation d’entraide, en particulier lorsque les Sarrasins se feront de plus en plus menaçants. Mais revenons un peu en arrière : comment les Goths sont-ils arrivés dans l’Empire romain ?

L’arrivée des Goths dans l’Empire romain : une coexistence impossible

Les Goths seraient arrivés en Europe au tout début du Ier siècle de notre ère. Mais ce n’est que deux siècles plus tard qu’ils font la rencontre du vaste et puissant Empire romain. Aux alentours de 238, après une avancée fulgurante à travers le continent européen, les Goths franchissent le Danube et menace directement les frontières de l’Empire romain. À cette époque, ce dernier est enlisé dans une crise interne, qui le rend plus vulnérable à l’extérieur, face aux peuples barbares. Jusqu’à la fin du IIIe siècle, les Romains et les Goths vont s’affronter lors de divers conflits aux frontières de l’Empire. Tantôt les empereurs romains écrasent les Germaniques, tantôt ces derniers mettent en déroute les légions romaines. En 290, survient la division entre Wisigoths et Ostrogoths. Les premiers s’établissent aux alentours dans la péninsule balkanique, les secondes choisissent de s’implanter près de la mer Noire. À partir là, Rome va devoir composer avec des Goths plus hétérogènes et répartis sur une plus grande distance. Les affrontements étant dramatiques pour les deux camps, l’Empire romain accorde le statut de « peuple fédéré » aux Goths vivant près du Danube. Les peuples fédérés doivent verser un tribut à Rome et lui porter assistance en cas de conflit armé. En échange, les Goths y gagnent la paix. Seulement, la cohabitation ne va pas se passer si bien que cela.

La coexistence entre les deux peuples était quasi impossible. Les autorités romaines font subir aux Goths un traitement très dur. Ils les maltraitent, les privent de leur approvisionnement en nourriture et en réduisent certains à l’esclavage. Eunape, rhéteur grec contemporain des événements, rapportent que les chefs romains échangeaient du pain contre des esclaves. Pourtant, l’empereur Valens exigeait que les Goths soient dignement intégrés dans l’Empire, signe d’une impuissance grandissante. Évidemment, il ne faut pas attendre longtemps pour que les Goths, menés par leur chef Fritigern, entrent en rébellion. En 377, des escarmouches éclatent dans plusieurs villes, dont Marcianopolis, importante colonie romaine. Surtout, les Goths parviennent à entraîner dans leur révolte d’autres catégories de la population opprimées par l’empire romain : des travailleurs, des esclaves ou encore des prisonniers. Les Goths mettent littéralement à feu et à sang la Thrace. Ils parviennent même à assiéger une ville d’une importance capitale : Andrinople.

La bataille d’Andrinople : un échec romain cuisant

Valens, empereur romain d’Orient, se trouve à Antioche, en Syrie, au moment où la rébellion des Goths éclate. Il préparait une campagne contre l’Empire perse, qui commençait à se faire menaçant au Proche Orient. La révolte des Goths vient donc perturber ses plans. Il parvient à négocier une trêve avec les Perses et décide d’envoyer une armée en Thrace pour stopper les raids ennemis. S’ensuivent des affrontements sporadiques, quelques escarmouches mais peu d’avancées significatives de part et d’autre. Mais Valens décide de porter son armée à un endroit bien précis pour affronter les Goths au cours d’une bataille rangée. Ainsi, le 9 août 378, le conflit change de visage : c’est le début de la bataille d’Andrinople.

Empereur romain Valens
Valens, empereur romain d'Orient

Retrouvez l’épisode de À travers l’Histoire sur la bataille d’Andrinople !

Les deux armées livrent une bataille acharnée. Concernant le nombre d’hommes en présence, l’historien Yann Le Bohec estime les Romains au nombre de 10 000 et les Goths autour de 15 000. Malgré cette nette différence, les Romains sont au départ bien plus entreprenants que les Goths, sur la défensive. Ces derniers sont pris de court par les attaques surprises romaines, mais pas pour longtemps. Les Goths, menés par deux grands chefs de guerre, Alatheus et Safrax, sont solidement implantés sur le terrain et ne fléchissent pas. Rappelons que les barbares avaient installé un camp à Andrinople, rendant le ravitaillement plus simple. De leur côté, les troupes romaines s’épuisent et leur nombre diminue au fil de la bataille. La disproportion des forces commence à se faire sentir. La cavalerie romaine doit prendre la fuite. La suite est encore plus dramatique. Les forces romaines sont écrasées définitivement et l’empereur Valens meurt au combat. Notons que les circonstances de sa mort ne sont toujours pas véritablement connues.

Après la bataille d’Andrinople, un semblant de paix s’instaure entre Goths et Romains, à l’initiative du nouvel empereur romain d’Orient : Théodose. Mais malgré cette apparence de paix et de retour à la normale, cette implantation aussi importante de barbares au coeur de l’Empire romain est un aveu de faiblesse colossal. Sur le plan politique, cette bataille entérine une tendance déjà amorcée depuis longtemps : la présence de barbares au sein de l’administration romaine, comme le célèbre Alaric 1er, roi des Wisigoths. Théodose, malgré une détermination bien plus importante que son prédécesseur Valens, doit finalement se résoudre à composer avec l’ennemi. En 382, un traité est signé, scellant l’installation des Goths au sein de l’Empire romain.

L’installation durable des Goths dans l’Empire romain

Après la bataille d’Andrinople, les Goths vont progressivement étendre leur influence au sein de l’Empire romain, tant par la voie diplomatique que par la voie des armes. La mort de Théodose ne va pas arranger les choses. Son successeur, Stilicon, se montre beaucoup moins complaisant à l’égard des Goths, qu’il affronte à plusieurs reprises. En 408, un événement vient refroidir la relation entre Goths et Romains. Cette année-là, tous les non-catholiques sont exclus du palais impérial. Les Goths, pour la plupart païens, en font ainsi les frais. La même année, Stilicon meurt et Honorius devient empereur romain d’Occident. Le nouvel empereur se montre intransigeant avec les Goths auxquels il veut récupérer des territoires. Dans ce contexte, la fièvre monte inéluctablement entre Goths et Romains. Alaric, roi des Wisigoths, ne voit qu’une seule issue à cet affront : la prise des armes et la guerre. Le chef wisigoth menace de marcher sur Rome et de mettre la ville à feu. Deux ans plus tard, en 410, Alaric passe à l’action et fonce sur Rome avec ses troupes, nombreuses et déterminées. 

Alaric 1er, roi des Wisigoths

Le 24 août 410, les puissants Wisigoths entrent dans Rome avec une extrême férocité. Ils pillent la ville pendant trois jours et la réduisent à la famine. Alaric demande tout de même à ses hommes d’épargner autant que faire se peut les civils ainsi que les édifices religieux. Malgré cela, une bonne partie de la ville tombe sous les flammes. Les archives romaines sont brûlées et de nombreux symboles de l’Empire romain sont détruits, sous les coups de l’armée d’Alaric. Beaucoup de romains sont contraints de s’enfuir en direction du sud de l’Italie. Certains changent même de continent et rejoignent l’Afrique. Alaric quitte la ville avec la soeur de l’empereur Honorius. Le sac de Rome marque profondément les esprits romains et porte un coup supplémentaire au colosse au pied d’argile qu’est devenu l’Empire romain. Un colosse auquel un autre peuple ne va pas tarder à s’attaquer : les Huns.

Les Huns ou la folle épopée d’Attila

Qui sont les Huns ?

L’origine des Huns est assez floue. Nous disposons de moins d’informations que pour les Goths. Néanmoins, leur incursion dans les radars romains a permis d’en apprendre un peu plus sur ce peuple réputé sauvage, et ainsi de remonter le temps pour découvrir leur origine. Les Huns sont un peuple originaire de l’Asie centrale, probablement d’origine mongole ou turc. Ils arrivent en Europe aux alentours du IVe siècle et c’est à partir de là que nous connaissons véritablement les Huns. Les Romains les décrivent comme des hommes trapus, de forte corpulence, avec léger côté bestial. Cet aspect sauvage, qui provient surtout d’un certain mépris des Européens pour les barbares, a été principalement illustré à travers la personnalité du plus grand chef que les Huns aient connu : Attila.

L’histoire d’Attila, du moins jusqu’à son arrivée en Gaule, est très floue. Sa date de naissance n’est, à ce jour, pas connue. Certains historiens donnent une fourchette entre 390 et 410. Le jeune Attila est élevé sur le modèle du pasteur guerrier, c’est-à-dire qu’il se nourrit de viande et de lait et qu’il reçoit une éducation de cavalier et d’archer. Il grandit dans un peuple qui est depuis peu installé en Europe, aux portes des Empire romains d’Orient et d’Occident. A l’origine, les relations entre les Huns et les Romains sont plutôt cordiales, grâce notamment au système d’otage honoré, qui consistait à envoyer un otage dans le camp adverse pour maintenir un certain équilibre de paix. Parmi ces otages, un va se lier d’amitié avec Attila : c’est Aetius, alors encore adolescent. Un peu plus tard, c’est au tour d’Attila d’aller en Gaule romaine.

Attila roi des Huns
Attila, roi des Huns

Malgré l’accueil chaleureux d’Aetius, Attila est nostalgique de son campement, de ses camarades et ne songe qu’à partir de ce monde romain qu’il juge décadent et corrompu. Une fois rentré, le chef hun médite attentivement sur son passage en Gaule romaine, commençant déjà à nourrir des pensées de conquête. En 434, le trône revient à Attila et à son neveu Bleda, selon un modèle de dyarchie. La relation entre les deux frères est explosive et Attila a bien l’intention de régner seul. Vers la fin de l’année 444, il le fait assassiner. Attila est désormais seul et unique roi des Huns.

Les Huns aux portes de l’Empire romain d’Orient

Une fois au pouvoir, Attila va rapidement porter ses troupes aux portes de l’Empire romain d’Orient. La stratégie du roi hun au pouvoir est surprenante mais non moins redoutable. Les Huns, pour subvenir à leurs besoins, exigent des tributs de leurs voisins. S’ils ne paient pas, Attila lance des razzias qui rapportent des butins considérables. Le roi des Huns cherche donc à maintenir ses voisins sous pression constante, usant d’intimidations, de sommations et de menaces. Pour reprendre les mots de l’historien Michel Mouche, les Huns d’Atilla se muent en véritable « société de prédateurs ».

Le 27 janvier 447, un tremblement de terre ravage une partie de Constantinople et de ses fortifications. De nombreux silos sont détruits, provoquant une famine importante. Attila y voit là une opportunité pour conquérir la ville. Lancées à pleine vitesse, les troupes du roi des Huns sont inarrêtables, si bien que les guerriers romains sont écrasés lors de la bataille de l’Utus. Les Huns pillent ensuite les provinces de Macédoine, de Mésie et de Thrace. Des négociations s’ouvrent alors avec l’empereur romain d’Orient Théodose II. Ce dernier finit par obtenir, sûrement par miracle, le retour à la situation d’avant 447. Pour l’empereur, le succès n’est que relatif dans la mesure où Attila se fait de plus en plus dangereux et manifeste toujours plus d’arrogance dans les négociations. Sa réputation d’envahisseur effrayant et impitoyable prend petit à petit forme. Mais en réalité, ce qui intéresse véritablement Attila se trouve plus à l’ouest : l’empire romain d’Occident.

Attila, affamé de richesse et de conquêtes, convoite dans le même temps l’empire romain d’Occident, alors pleine décadence, dirigé par un empereur impuissant, Valentinien III. Pour calmer les ardeurs du roi des Huns, la soeur de l’empereur, Honoria, adresse une bague de fiançailles à Attila, lui proposant le mariage en échange de lui donner des droits sur la moitié de l’empire. Mais les romains ne prennent pas au sérieux cette vulgaire proposition. Sauf un, qui connaît bien Attila : son ami d’enfance, Aetius.

Comment les Huns ont-ils envahi la Gaule ?

Attila fait alors face à dilemme de taille : attaquer l’empire romain d’Orient ou l’empire romain d’Occident ? Attaquer Rome et Byzance ? Pour le roi des Huns, ce sera Rome. Mais bien évidemment, il sait qu’il ne peut pas se jeter à l’assaut de la ville éternelle directement. Il va d’abord passer par l’arrière-cour de l’Empire romain d’Occident si l’on peut dire ainsi : la Gaule. En 451, Attila se lance à la conquête de la Gaule, dont la plupart des territoires sont des provinces romaines. Encore une fois, le roi des Huns fait preuve de malice et de ruse, à travers des stratégies de langage redoutable. Il promet aux Wisigoths de ne s’en prendre qu’aux Romains, et aux autres Gaulois, il promet de ne s’en prendre qu’aux Wisigoths. Très vite, les hommes d’Attila ravagent le nord de la Gaule : Mayence, Cologne, Amiens, et des dizaines d’autres villes sont sauvagement pillées et mises à sac.

Attila et les Huns

Face à l’avancée fulgurante des Huns qui fait grimper l’inquiétude au sein de l’élite politique romaine, Aetius est nommé général en chef de l’armée romaine. Sa mission est d’endiguer le raz-de-marée des Huns et de les renvoyer. Ces derniers arrivent aux portes de Paris, mais décident de continuer leur chemin vers le sud en épargnant les Parisiens. Une légende raconte que Saint-Geneviève, sainte patronne de Paris, aurait fait fuir Attila par ses prières. Dans les faits, le roi des Huns est pressé. Il doit atteindre Toulouse avant l’arrivée des troupes d’Aetius. C’est une véritable course contre la montre qui se déploie dans l’Empire romain. Aetius est plus rapide et parvient à faire reculer les Huns au niveau de Chalon-en-Champagne. S’ensuit alors une célèbre bataille, qui marquera la fin des raids fulgurants d’Attila : la bataille des champs Catalauniques. Cette bataille a donné lieu à un schéma très complexe d’alliances. Les Wisigoths se sont alliés aux Romains pour défaire les Huns, ce qui a d’ailleurs permis à Aetius de l’emporter.

Attila à l’assaut de Rome

Mais en féroce guerrier qu’il est, Attila décide de ne pas abandonner son projet pour autant et fonce sur Rome. Mais ce coup-ci, pas de détour. Là encore, son ancien ami d’enfance a toujours une longueur d’avance. Aetius et ses hommes se replient le plus au sud possible en pratiquant la politique de la terre brûlée, qui consiste à brûler les terres, les ressources et détruire les vivres : bref laisser derrière un vrai désert. De nombreux hommes d’Attila meurent de faim, d’épuisement ou encore de chaud. Mais Rome est si proche, Attila entrevoit la Ville Sainte, ce n’est pas le moment de céder. C’est alors qu’un autre personnage va entrer en jeu : c’est le pape Léon 1er, appelé à la rescousse par l’empereur Valentinien III, impuissant. Une scène pour le moins surprenante va alors se produire.

En juin 452, Attila est aux portes de Rome et trouve en face de lui, non pas une armée prête à en découdre, mais la procession pontificale : en gros, le pape et ses fidèles. D’un côté, Attila et ses hommes, armés jusqu’aux dents, de l’autre, des hommes vêtus de blanc et d’or, avec pour seules armes des encensoirs d’où s’échappent des fumerolles sacrées. Et là, seul, Attila s’avance au milieu du champ de bataille. Le pape fait de même. Les deux hommes ont un échange, dont nous ne connaissons absolument rien de la teneur. Mais une chose est certaine : ces quelques mots vont changer le cours des événements. Contre toute attente, Attila retourne auprès de ses hommes et rebrousse chemin. C’en est fini de la conquête de l’Empire romain d’Occident pour Attila.

La mort d’Attila et ses conséquences

En 453, Attila meurt de façon soudaine dans son sommeil, étouffé par un saignement de nez au cours d’une de ses innombrables nuits de noces. La succession du roi des Huns débouche sur de violents conflits entre ses fils. Finalement, son empire ne lui survivra pas. Avec Attila meurt l’empire Hun, qui a bien failli prendre le contrôle de toute l’Europe.

Mais alors que retenir du personnage d’Attila ? Il faut bien comprendre qu’il existe des traditions divergentes sur la question. En Occident, le personnage d’Attila est résumé par l’expression « fléau de Dieu », qui, parle d’elle-même. Isidore de Séville, ecclésiastique du VIIe siècle, disait « Les Huns sont le bâton de la fureur de Dieu. Chaque fois que la colère de Dieu s’abat sur les fidèles, c’est par eux qu’ils sont frappés ». Autant dire qu’être assimilé à un châtiment divin n’est pas très élogieux.

Cette vision maléfique d’Attila est symptomatique de l’effroi que ce dernier a inspiré à l’Empire romain, mais aussi à d’autres peuples barbares comme les Goths, qui étaient bien contents de trouver l’aide de Rome lorsque les Huns étaient à leurs trousses. Les Huns ont profondément bouleversé les rapports entre les barbares et les Romains. Ces derniers ont compris qu’il était essentiel de faire des concessions aux peuples voisins, au risque de les voir mener des raids comme Attila a pu le faire. Or, l’Empire romain n’a plus les moyens de résister.

Conclusion sur les invasions barbares

Les invasions barbares, bien que le terme soit controversé, ont joué un rôle majeur dans l’effondrement de l’Empire romain d’Occident. Rome n’a jamais vraiment pu composer avec ces peuples qui se massaient à ses frontières. Les Goths et les Huns font partie de ceux qui ont fait trembler le vaste édifice fondé par Auguste des siècles plus tôt. En 476, l’Empire romain d’Occident rend son dernier souffle. Sur ses ruines émergent alors des royaumes barbares, qui vont jouer un rôle majeur dans l’évolution de l’Europe du Moyen-Âge. Les Wisigoths vont s’installer en Hispanie. Les Ostrogoths fondent un royaume en Italie, qui était le coeur battant de l’Empire romain. Les Francs vont s’emparer d’une bonne partie de la Gaule, posant ainsi les fondations de ce qui deviendra plus tard le royaume de France. Les Vandales vont, quant à eux, s’installer sur les anciens territoires de l’Empire romain en Afrique du Nord. Ces royaumes vont participer aux plus grandes heures de l’histoire européenne médiévale. Le royaume franc finira par devenir un empire sous Charlemagne. Le royaume wisigoth sera défait par les incursions arabes qui propulseront l’Espagne dans une période majeure de son histoire : la Reconquista. Si l’on prend un peu de recul, on remarque que les invasions barbares sont en quelque sorte allées de le sens de l’Histoire, l’histoire d’un Empire romain qui se fragilise, sous le coup des problèmes internes, et qui n’a guère d’autre destin que de s’effondrer.

Les invasions barbares : moments forts

  • 27 avant J.C. : naissance de l’Empire romain. Auguste, fils de Jules César en devient le premier empereur.
  • 238 : Les Goths franchissent le Danube et se retrouvent aux portes de l’Empire romain.
  • 290 : date présumée de la vision des Goths, entre Ostrogoths et Wisigoths.
  • IVe siècle : arrivée des Huns aux alentours de l’Empire romain.
  • 377 : Affrontements violents entre Goths et Romains dans plusieurs villes.
  • 9 août 378 : Bataille d’Andrinople. Victoire décisive des Goths.
  • 382 : traité signé entre les Goths et les Romains, scellant l’installation des premiers dans l’Empire romain.
  • 24 août 410 : Sac de Rome par les troupes du roi wisigoth Alaric 1er.
  • 444 : Attila devient seul et unique roi des Huns.
  • Janvier 447 : Les Huns pillent Constantinople, après un tremblement de terre. Puis ils continuent sur leur lancée.
  • 451 : Attila décide de se tourner vers l’Empire romain d’Occident. Il attaque la Gaule à coups de raids fulgurants.
  • Juin à Septembre 451 : Bataille des Champs Catalauniques. Victoire des Romains d’Aetius qui repoussent les Huns.
  • 452 : Attila est aux portes de Rome, face à la procession pontificale. Il rebrousse chemin contre toute attente.
  • 453 : Mort d’Attila.
  • 476 : Chute de l’Empire romain d’Occident.

Les invasions barbares : l'essentiel

  • Les invasions barbares constituent un épisode majeur de l’histoire de l’Empire romain. Néanmoins, on parle davantage de « migrations des peuples », étant donné qu’il s’agit d’un lent processus plus qu’un événement précis daté dans le temps. L’Empire romain a été confronté à différents peuples barbares qui ont menacé la sécurité de ses frontières : les Goths et les Huns en font partie.
  • Les Goths désignent un peuple germanique ayant existé grosso modo du Ier siècle au IXe siècle. Les Goths se divisent en deux branches : les Wisigoths et les Ostrogoths.
  • Au Ier siècle, Les Goths apparaissent en Europe. Deux siècles plus tard, ils font la rencontre de l’Empire romain. Aux alentours de 238, après une avancée fulgurante à travers le continent européen, les Goths franchissent le Danube et menace directement Rome.
  • Des affrontements vont éclater entre Goths et Romains, tantôt à l’avantage des premiers, tantôt à l’avantage des seconds. Finalement, les tensions vont s’apaiser lorsque les Goths vont obtenir à la fin du IIIe siècle le statut de « peuples fédérés ».
  • Finalement, le 9 août 378, Goths et Romains s’affrontent lors de la célèbre bataille d’Andrinople. Les Goths l’emportent et les Romains encaissent une lourde défaite qui les met dans une position bien délicate à l’égard des barbares.
  • Le 24 août 410, les Wisigoths d’Alaric 1er mettent Rome à sac et pillent la ville. Il en résulte un profond traumatisme pour les Romains, pour la plupart obligés de fuir la ville et même le pays.
  • Après les Goths survient un autre peuple qui va poser autant de problèmes à l’Empire romain : les Huns. Les Huns sont un peuple originaire de l’Asie centrale, probablement d’origine mongole ou turc. Ils arrivent en Europe aux alentours du IVe siècle. Les Romains les décrivent comme des hommes sauvages, à l’image de leur chef : Attila.
  • Le jeune Attila est élevé sur le modèle du pasteur guerrier, c’est-à-dire, qu’il se nourrit de viande et de lait et qu’il reçoit une éducation de cavalier et d’archer.
  • En 444, il devient roi des Huns, avec l’ardent souhait de marcher sur l’Empire romain. Les Huns se portent d’abord aux frontières de l’Empire romain d’Orient.
  • Le 27 janvier 447, un tremblement de terre ravage une partie de Constantinople et de ses fortifications. Attila y voit là une opportunité pour conquérir la ville. Lancées à pleine vitesse, les troupes du roi des Huns sont inarrêtables, si bien que les guerriers romains sont écrasés lors de la bataille de l’Utus. Les Huns pillent ensuite les provinces de Macédoine, de Mésie et de Thrace.
  • Après ces quelques raids, Attila se projette sur Rome et prévoit de conquérir la ville, en passant d’abord par la Gaule. Il se lance à travers la Gaule en 451 et ravage de nombreuses villes en chemin. La même année, Attila est arrêté par son ancien ami d’enfance Aetius, près de Troyes, lors de la bataille des Champs Catalauniques.
  • Un peu plus tard, il retente sa chance et repart en direction de Rome. Proche de la ville, il rencontre le pape et la procession pontificale. Attila rebrousse chemin sans que l’on ne sache pourquoi. Le reste appartient à l’Histoire.
  • Attila rend l’âme en 453 et emporte l’empire hunnique avec lui, qui ne retrouvera jamais la vigueur et la puissance qu’Attila lui avait donné.
  • Les invasions barbares ont joué un rôle majeur dans l’effondrement de l’Empire romain d’Occident. Bien qu’elles n’en soient pas la cause principale, elles ont fragilisé son unité, son armée et son appareil politique. Les barbares ont infiltré la culture romaine, les instructions et tous les domaines de la vie des cités de l’Empire romain.
  • En 476, l’Empire romain d’Occident succombe à toutes ses difficultés et s’effondre. Des royaumes barbares émergeront sur ses ruines.

Pour en savoir plus sur les invasion barbares et l'Empire romain :

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